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Le contrat à impact social, un investissement philanthropique?

Marie Melikov - Senior Program Manager of Degroof Petercam Foundation
Lever des fonds privés afin de financer des actions sociales publiques, voilà l’objectif des contrats à impact social (initialement baptisés Social Impact Bonds). Ce type d’investissement peut représenter une véritable opportunité pour faire face au manque de financement des pouvoirs publics dans la résolution de certaines problématiques sociales.

Des success stories intéressantes

C’est au Royaume-Uni que le premier contrat à impact social fut lancé en 2010. Le Secrétaire à la Justice britannique annonça alors une collaboration avec plusieurs associations pour mettre sur pied un programme de suivi et de réinsertion de 3 000 prisonniers qui permettrait d’éviter la récidive et ainsi baisser les coûts d’incarcération. Si l’initiative permettait une baisse de récidive de 7,5 % après six ans, les investisseurs recevaient une partie des économies réalisées. Et sept ans plus tard, l'objectif est dépassé de 2%. Les 17 investisseurs pionniers ont alors reçu le remboursement de leur mise de départ, mais également une prime (calculée sur la base d’un rendement annuel de 3%). Le premier contrat à impact social était né. Treize ans après, on dénombre près de 277 contrats à impact social à travers le monde.

Contrat à impact : comment cela marche?

Cette forme de partenariat public-privé met à la portée des gouvernements des perspectives de collaboration novatrices avec le secteur privé. En effet, cet outil de financement permet d’orienter des fonds privés vers le financement de solutions innovantes (et donc plus risquées) à des problèmes sociétaux. L’investisseur s’engage à financer un programme social prometteur qui permet à l’Etat d’économiser des deniers publics. L’Etat s’engage à son tour à rémunérer cet investisseur avec une partie des fonds qu’il aura économisés. Une idée en somme basée sur le principe du gagnant-gagnant. Pour mettre en œuvre ce type de contrat, des intervenants externes tel que des structurateurs (pour la modélisation financière, la gestion des différentes parties prenantes et la levée de fonds), des juristes spécialisés mais également des évaluateurs externes sont nécessaires.

Ce type d’investissement apporte à chaque partie prenante des avantages :
  • Au niveau des investisseurs, cela permet d’investir avec un impact. La philanthropie et les investisseurs sociaux ont leur part de risque à prendre s’ils souhaitent s’atteler à ses enjeux de société qui nécessitent souvent un changement de cap important, avec les incertitudes que cela peut entraîner. Le remboursement tant du principal que de la prime va ainsi varier en fonction d’objectifs sociétaux prédéfinis dans le contrat.
  • Au niveau des pouvoirs publics, le contrat à impact sociétal permet de tester une solution innovante sans prendre de risque financier en amont. En effet, les pouvoirs publics vont rembourser les investisseurs initiaux si seulement les solutions apportées par l’opérateur ont fait leurs preuves en privilégiant le préventif au curatif.
  • Au niveau des organisations ou des associations (les opérateurs), ce contrat social leur permet une visibilité mais également une légitimité dans la solution apportée. En effet, si les résultats sont là, les pouvoirs publics reconnaissent donc directement que la solution qu’ils apportent au défi social actuel apporte une solution et peuvent décider de poursuivre le financement structurel de ces organisations post-investissement. Ce contrat exige ainsi des associations d’être capables de mesurer leur impact en précisant clairement les objectifs à atteindre.
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Schéma explicatif du structurateur Kois Investment 2023 pour le contrat à impact social conclu en 2023 entre Duo for Job, le ministère français du travail et Degroof Petercam Foundation

Un outil miracle?

Alors que l’impact investing est en plein boom (l’investissement à impact est estimé à 80 milliards d’euros en 2022), comment expliquer qu’en près de 13 ans d’existence, les contrats d’impact social n’ont pu lever que 700 millions d’euros ?
  • Dans un article publié sur le blog de la banque mondiale, l’une des raisons qui est mise en avant pour expliquer ce lent démarrage est que ce type d’investissement est encore cantonné à un nombre restreint d’investisseurs. Cela s’explique notamment par les coûts de mise en place très élevés, la durée de mise en œuvre encore trop longue ou l’absence de marché secondaire pour ce type d’instruments.
  • D’autres voix alertent sur le fait qu’il s’agit d’outils très spécifiques qui ne doivent jamais devenir des produits d’investissement. En effet, il parait indispensable de se prémunir des dérives possibles sur des sujets qui devront rester éminemment hors-jeu de quelconques spéculations.
  • Un autre frein quant au déploiement du dispositif est qu’il repose sur l’évaluation de l’action sociale, ce qui est particulièrement difficile et doit être pris avec beaucoup de précaution.
Le contrat à impact social ne fonctionne d’ailleurs pas pour tous les sujets sociétaux : les solutions apportées doivent être mesurables à relativement court terme et répondre à un sujet critique pour les pouvoirs publics. Il est pour cela intéressant pour le sujet de la mise à l’emploi, un critère de politique publique essentiel et mesurable. Il est beaucoup plus difficile pour l’enseignement ou la santé préventive, par exemple, même si prioritaire en matière de politique publique, le « temps d’impact » étant très long terme et coûteusement mesurable.

Cette méthode de financement est devenue définitivement attrayante pour des philanthropes soucieux de jouer un rôle complémentaire au pouvoirs publics et d’ouvrir cet espace de coopération. Reposant sur des données solides et une évaluation rigoureuse, il instigue dans la philanthropie des pratiques vertueuses, démontre que le système peut progresser et permet la confiance du secteur public que des solutions plus efficientes sont possibles.
De son côté, Degroof Petercam Foundation a été précurseur en souscrivant, dès 2017, au premier contrat à impact social lancé en Belgique avec l’Office Régional bruxellois de l’Emploi (Actiris) et Duo for a Job. Le contrat avait pour objectif d’aider à l’insertion professionnelle des jeunes demandeurs d’emploi (âgés de moins de 30 ans) issus de l’immigration dans la région bruxelloise. Si le taux d’emploi des participants à Duo for a Job était d’au moins 10 % supérieur à celui d’un groupe de contrôle, les autorités publiques remboursaient les investisseurs sociaux avec la possibilité de toucher un rendement additionnel en fonction du degré de réussite du programme. Et le succès a été au rendez-vous car 3 ans plus tard, la mise de départ ainsi qu’un rendement additionnel de 4% ont été remboursé à la Fondation mais surtout 322 nouveaux duos ont été créé tout en renforçant l’action et la visibilité de Duo for a Job. Et c’est avec conviction et enthousiasme que la Fondation investit à nouveau en 2023 dans le second contrat à impact social de Duo for a Job avec le Ministère français du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion cette fois-ci. Cette souscription s’inscrit dans la politique d’investissement à impact que le Fondation a mise en place récemment et que nous aborderons lors d’un prochain article.
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Saviez-vous que la Fondation Degroof Petercam sélectionne et soutient des solutions innovantes pour l’emploi ?

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