Sans transition et pour conclure ce volet de votre parcours de vie, votre club de football ?
HL : Mon père était un fervent supporter d’Anderlecht. Donc moi, de Bruges ! Autonome, je vous disais !
Une grande passion pour la gestion. Une solide conviction pour la durabilité.
Parlons maintenant de votre parcours professionnel. Dans le cadre de Degroof Petercam, vous avez dirigé DPAM (Degroof Petercam Asset Management), une entité au sein du Groupe qui gère l’activité de gestion et de distribution des fonds de placement pour une clientèle institutionnelle.
Dans le fond, d’où vous vient votre intérêt marqué pour… les fonds de placement ?
HL : J’ai toujours considéré que le métier d’asset management était le plus beau métier du monde. Avoir une idée, l’analyser, la réaliser et assumer les conséquences de son choix. Évidemment, on ne maîtrise pas toujours tout – surtout dans un monde financier où on n’a pas toute l’information, où tout évolue et change en permanence – mais être à l’origine d’un projet, la création d’un fonds, et le porter jusqu’à ce qu’il produise des résultats, c’est extrêmement valorisant. Supporter les conséquences de ses choix procure un stress, certes, mais éminemment positif et stimulant. Car en en fin de compte, on fait tout cela pour le client.
Vous avez été un pionnier de l’investissement responsable et porté une conviction que le monde de la gestion devait s’engager dans cette voie.
HL : C’est vrai et depuis longtemps, dès les années 90. Cette conviction-là n’était alors pas du tout prise au sérieux. Il faut dire que les marchés étaient essentiellement aux mains de décideurs anglo-saxons pour qui seule la performance financière comptait. Sacrifier le rendement au profit d’une démarche environnementale, sociale et de gouvernance (ESG) était tout bonnement inconcevable. À contre-courant, j’ai toujours été convaincu – et aujourd’hui encore plus – qu’on pouvait parfaitement réconcilier et combiner objectifs financiers et enjeux de durabilité.
Dans une perspective de meilleure gestion donc ?
HL : Pas seulement. En fait cette démarche rend notre entreprise relevant. Pertinente par sa value proposition, en termes d’impact réel que celle-ci peut avoir sur la société au sens large. Gérer les avoirs de nos clients avec des résultats financiers et la possibilité de mettre œuvre des aspects de durabilité leur procure un meilleur rendement : les résultats financiers et extra-financiers qui se renforcent mutuellement. Cette démarche s’inscrit aussi dans l’ADN de notre entreprise. Nous sommes un acteur financier qui a toute sa place sociétalement parlant.
C’est votre ligne de développement pour la maison Degroof Petercam ?
HL : Ce n’est pas qu’un cahier de charge. C’est un comportement qui est au cœur de notre entreprise. ‘Créer une prospérité collective et responsable’ fait partie de la raison d’être de notre groupe, non parce que nous le devons, mais parce que nous le voulons.
Gérer et développer : deux piliers d’une stratégie
Abordons le dernier volet de cette rencontre : votre rôle en tant que CEO. Tout d’abord, le contexte dans lequel vous avez accepté cette nouvelle responsabilité.
HL : En fait, au départ, c’est Bruno Colmant qui, il y a plusieurs mois, a indiqué vouloir se focaliser sur la direction de la banque privée. Par parenthèse, et pour la petite histoire, Bruno et moi nous nous sommes rencontrés en 1986 chez Arthur Andersen, devant un distributeur de boissons ! Il était alors senior advisor et moi assistant. La roue tourne ! Depuis 30 ans, nous nous croisons régulièrement dans nos parcours professionnels respectifs. Nous nous connaissons donc très bien.
Degroof Petercam cherchait un nouveau CEO. Et ensuite ?
HL : Par le passé, comme CEO de DPAM, j’avais eu l’occasion informelle d’exprimer mes vues sur l’organisation et la stratégie de Groupe. Puis, il y a eu une recherche de candidats et le président de notre conseil d’administration, Gilles Samyn à qui j’avais aussi exprimé mes convictions m’a proposé « de sortir du bois » pour pouvoir mettre en œuvre les propositions que je défendais. Quand l’opportunité s’est présentée, j’ai souhaité la saisir et mettre mon expérience au service de la maison. J’ai posé une condition importante à mes yeux : mon projet devait recueillir l’unanimité des actionnaires. Ce qui s’est passé.
Quelle est donc cette vision et les lignes de force de cette stratégie ?
HL : Je suis là pour gérer et développer Degroof Petercam. Je vous l’ai dit, ma madeleine de Proust, c’est gérer et développer nos quatre lignes de métiers intégrés. Ensemble, avec tous mes collègues.
Développer quoi en fait ?
HL : Nous avons un portefeuille d’activités et d’expertises unique que nous mettons au service de nos clients. Quand j’observe nos concurrents, en fait, tous nous envient les quatre métiers dans lesquels nous sommes déjà bien présents : banque privée, gestion institutionnelle, investment banking et gestion administrative des fonds. Ces expertises que nous avons la chance de posséder par historique et par compétences forment un écosystème fantastique.
Un exemple ?
HL : Notre département Corporate Finance conclut un deal avec une entreprise, grande ou moyenne. L’actionnaire principal nous fait savoir qu’il souhaiterait être accompagné pour la gestion de son patrimoine privé et devient client de notre Private Banking. Son portefeuille est construit entre autres avec des fonds patrimoniaux gérés par cette dernière et des expertises spécifiques développées par DPAM. DPAM fait appel à l’asset services maison pour le volet administratif de ces fonds de placement. Tout est intégré. Évidemment, toutes ces expertises peuvent être utilisées par nos clients séparément et répondent donc à de très nombreuses typologies de clientèle. Peu de sociétés ont ces compétences et des centres de décision si proches. Last but not least, avec des actionnaires familiaux qui ont une vision long terme.
C’est cette spécificité que vous voulez développer ?
HL C’est évident. Chaque métier a ses spécificités, son périmètre à étendre, à consolider le cas échéant. Quatre exemples significatifs parmi d’autres. Pour la banque privée, à Luxembourg, devenir un hub international. En Belgique, tant en Flandre qu’à Bruxelles et qu’en Wallonie, résolument renforcer notre position. Pour la gestion institutionnelle, être présents sur des marchés où DPAM a une plus-value indiscutable. Récemment nous avons lancé une joint venture à Hong Kong. Juste pour vous donner une idée. Pour l’investment banking, continuer à faire rayonner nos activités de Corporate Finance en Belgique et en France, de même que l’accompagnement de nos clients en matière d’opérations sur le marché des capitaux.
Un mot clé pour votre stratégie ?
Scalability. Le fait d’être évolutif en permanence. L’environnement dans lequel nous opérons est en train de changer à grande vitesse. Les besoins de nos clients, les contraintes réglementaires, les évolutions technologiques. Dans le fond, ce n‘est pas nouveau. C’était déjà comme ça quand j’ai commencé ce métier il y a 30 ans. La seule différence, c’est l’accélération. Un autre changement majeur dans les années à venir, je l’ai évoqué, c’est l’enjeu ESG.
De nombreux défis donc !
HL : Surtout de nouvelles opportunités à saisir. Il y a plusieurs façons d’atteindre un but. Tous les chemins mènent à Rome, non ?
Exact. « Le véritable voyage de découverte ne consiste pas à chercher de nouveaux paysages, mais à avoir de nouveaux yeux », a dit Marcel Proust. Merci Hugo.