Cet écrémage vise – outre la simplification du droit des sociétés – à faire de la SRL la forme standard des sociétés (familiales).
La forme juridique de votre entreprise a-t-elle été supprimée par le CSA ? Pas de panique ! Votre entreprise a été automatiquement convertie le 1ᵉʳ janvier 2024 en l'une des formes juridiques conservées par le CSA. Sachez toutefois que dans ce cas, le conseil d'administration est tenu de convoquer une assemblée générale au plus tard 6 mois après la transformation de plein droit afin d'adapter les statuts à la nouvelle forme de société.
Nous modifions les statuts. À quoi devons-nous être attentifs en matière de planification successorale ?
La modification des statuts ne doit pas être considérée uniquement comme une obligation légale à laquelle il faut se conformer ; elle peut également constituer une opportunité. Le nouveau droit des sociétés offre en effet un certain nombre de possibilités intéressantes qui, moyennant une analyse préalable approfondie, peuvent être exploitées de manière optimale dans le cadre de la planification successorale.
L'élaboration d'un planning successoral en faveur de la (des) génération(s) suivante(s) poursuit généralement différents objectifs. À la limitation du coût fiscal s’ajoutent souvent le maintien du contrôle, d'une part, et/ou la préservation des revenus, d'autre part. Les parents sont souvent réticents à l'idée de céder immédiatement tout contrôle. Cela peut s’avérer d'autant plus vrai lorsque le transfert concerne les actions de l’entreprise familiale.
Dans un tel contexte, le contrôle et le maintien des revenus peuvent être assurés, par exemple, par une donation d'actions avec réserve d'usufruit. En tant qu'usufruitier, le donateur continue d'exercer le droit de vote (contrôle) et reste habilité à percevoir les revenus.
Toutefois, le contrôle et le maintien des revenus peuvent, dans certains cas, être ancrés au niveau de la société elle-même, notamment par le biais des statuts. La nouvelle loi élargit les possibilités dans ce domaine.
Ancien Code des sociétés - Sous l'ancien Code des sociétés, la S(P)RL, la forme juridique la plus courante pour les entreprises familiales, était régie par les adages "une action (donne droit à) une voix" et "chaque action donne droit à une part égale des bénéfices (ou des pertes)". En résumé, chaque action comportait obligatoirement les mêmes droits (et les mêmes devoirs). Ces principes fonctionnaient de manière contraignante dans le cadre de la planification successorale, notamment lors de la transmission de(s parts de) l'entreprise familiale.
En effet, les parents qui souhaitaient conserver le contrôle de l'entreprise familiale après le transfert des actions à la génération suivante (en dehors du contexte d'une donation avec réserve d'usufruit - voir plus haut) devaient conserver au moins 50,01 % des actions. Ils disposaient ainsi d'une majorité (simple) des droits de vote et pouvaient, entre autres, assurer leur fonction d'administrateur (ou de gérant) et prendre les décisions relatives à l'éventuelle distribution des bénéfices.
Nouveau CSA – Le nouveau droit des sociétés (régi par le CSA), offre davantage de liberté et de flexibilité dans l'organisation des droits attachés aux actions.
Désormais, même au sein d’une SRL, il est permis de travailler avec différents types (ou catégories) d'actions, c'est-à-dire des actions auxquelles sont accordés des droits différents.
Par exemple, il est possible de créer des catégories d'actions avec des droits de vote différents : actions sans droit de vote, actions avec droits de vote multiples (par exemple, pour les membres actifs de la famille au sein de l'entreprise), actions avec droit de veto (pour des décisions spécifiques), etc. Le niveau de participation aux bénéfices (ou aux pertes) peut également être différencié et vous pouvez donner libre cours à votre créativité : actions avec un droit de participation aux bénéfices plus élevé, actions avec des droits de participation aux bénéfices en fonction de la durée de détention, etc.
Tout cela offre d'intéressantes possibilités de planification patrimoniale. Quelques exemples à titre d'illustration :
- L'émission d'actions à droit de vote multiples pour les parents leur permet de donner plus d'actions en pleine propriété. Avec un nombre limité d'actions, ils conservent suffisamment de droits de vote (et donc de contrôle) ;
- L'émission d'actions à droit de vote multiple (dans certaines matières) et de droits de participation aux bénéfices plus étendus pour les membres de la famille qui sont actifs dans l'entreprise. De cette manière, les membres actifs de la famille peuvent faire passer des décisions importantes sans l'accord des membres non actifs de la famille, tout en conservant une incitation financière suffisante pour s'investir dans l'entreprise familiale ;
- La création d'une "golden share" entre les mains des parents, leur permettant d'exercer un droit de veto.
Les possibilités sont légion, mais toutefois pas illimitées !Il ne faut, par exemple, pas perdre de vue que les actions sans droit de vote s’accompagnent néanmoins d'un droit de vote dans certains cas (par exemple, lors de la modification des droits attachés aux types d’actions) et qu’il n’est pas (encore) permis d’attribuer la totalité des bénéfices à une seule action.
Il faut, en outre, toujours être vigilant quant aux effets secondaires indésirables de la « formation de classes d’actions ». Par exemple, les actions privilégiées (c’est-à-dire les actions assorties de droits de participation aux bénéfices plus favorables) sont automatiquement exclues du régime dit « VVPR-bis » – un régime fiscal favorable qui permet de distribuer des dividendes (sous certaines conditions) à un taux de précompte mobilier réduit (15% au lieu de 30%) – et les actions sans droit de vote peuvent s’avérer problématiques en vue de l’application du régime favorable pour la transmission d’entreprises familiales (en matière de droits de donation et de succession). Une analyse préalable approfondie est à recommander.
Ne perdez pas de vue l’interaction entre le testament ou le mandat extrajudiciaire, d’une part, et les statuts de votre société, d’autre part.
Les actions qui se trouvent encore dans votre patrimoine au moment de votre décès font partie de votre succession. Ces actions sont ensuite normalement transmises à vos héritiers et/ou aux légataires que vous avez désignés comme bénéficiaires dans votre testament. Les statuts de votre société peuvent toutefois contenir des restrictions concernant la transmissibilité des actions en cas de décès. Par exemple, il se peut que les actions doivent d’abord être proposées aux actionnaires existants (droit de préemption) ou que le transfert doive préalablement être approuvé par l’assemblée générale (clause d’agrément). Si vous voulez éviter des surprises désagréables à vos héritiers/légataires - qui peuvent également aller à l'encontre de vos propres souhaits - une analyse de vos statuts sur ce point est recommandée.
Le mandat extrajudiciaire est très souvent utilisé comme instrument pour organiser la gestion de votre patrimoine (en la déléguant à un mandataire) dans les situations où vous-même, temporairement ou définitivement, n'êtes plus en mesure d'agir. Dans cette optique, le mandat extrajudiciaire est également souvent considéré comme un moyen d'assurer la continuité au sein de l'entreprise (familiale) en autorisant, par exemple, le mandataire à vous représenter à l'assemblée générale. Cet instrument a toutefois également ses limites et ne peut, par exemple, pas être utilisé pour déléguer votre mandat d'administrateur à un tiers. Vous devez dans ce cas nommer un ou plusieurs administrateurs subsidiaires dans vos statuts.
Il ne vous aura pas échappé que la combinaison des différentes législations applicables aux sociétés et aux associations reste un enchevêtrement compliqué. Il est donc important d'examiner votre situation de manière pluridisciplinaire. Que vos statuts doivent encore être modifiés ou non, prenez le temps aujourd'hui pour votre entreprise de demain.