Mais quelles sont ces obligations durables ? Sont-elles pour autant toutes roses ou plutôt toutes vertes ? Quels sont les différents freins et leviers à ce marché, tant pour l’émetteur que pour l’investisseur ? Abordons ci-dessous toutes ces « nuances de durabilité ».
Les nuances de durabilité
Rappelons que des obligations durables, souscrites par des investisseurs qui prêtent de l'argent et perçoivent des intérêts, fonctionnent de la même manière que des obligations classiques (structure, rendement, risque). Elles se distinguent néanmoins par un reporting détaillé sur les investissements qu'elles financent et par le caractère ou l’objectif durable, vert ou social, des projets financés.
La plupart des investisseurs sont aujourd’hui familiers avec les green bonds ou obligations vertes, émises par une entreprise ou une entité publique pour financer des projets contribuant à la transition écologique (énergies renouvelables, efficacité énergétique, gestion durable des déchets et de l’eau, transport propre, ...).
L’Union européenne constitue le berceau de ce marché puisque la première obligation verte a été émise en 2007 par la Banque Européenne d'Investissement pour sensibiliser au climat, via son Climate Awareness Bond.
Cependant, il a fallu attendre l’année 2014 pour que le marché des green bonds se développe réellement, lorsque l’Association Internationale des Marchés de Capitaux (ICMA) a publié les Green Bond Principles (GBP). Ces principes constituent un cadre de référence (facultatif, et non règlementaire) et permettent notamment d’accroître la transparence des projets financés.
Aujourd'hui, l'Europe domine toujours le marché. D'une part, avec la mise en place de son plan de relance Next Generation EU qui prévoit d’émettre entre 750 et 800 milliards d'euros de dettes d’ici fin 2026, dont un tiers sous forme d’obligations vertes. Et d'autre part, avec l'adoption de l'EU Green Bond Standards. En effet, pour la toute première obligation verte de la Commission Européenne émise début octobre 2021 pour financer le volet climatique de ce plan de relance, il a fallu développer un cadre qui prévoie des dispositifs de reporting, de contrôle, d'évaluation et même des pénalités si le programme d’investissement annoncé n’était pas respecté.
Si la dimension environnementale est importante, la dimension sociale ne l’est pas moins pour une « transition juste ». Ainsi, à l’instar des Green Bond Principles, l’ICMA a lancé en 2017 les Social Bond Principles (SBP), axés également sur la transparence de l’utilisation des fonds et le reporting et pouvant être utilisés par exemple par des sociétés immobilières pour des logements sociaux, ou par des sociétés agroalimentaires pour une agriculture plus responsable.
Mais ce n’est que récemment, que les obligations sociales ont réellement pris leur envol. Cette accélération est due en grande partie aux émetteurs souverains, dont de nouveau l'Union européenne qui a notamment émis 90 milliards d'euros avec son programme Sure pour aider les Etats membres à mettre en place le chômage partiel lors du confinement.
En revanche, les obligations sociales semblent avoir plus de mal à percer chez les entreprises, sans doute parce qu’il est plus difficile pour une entreprise de définir des projets sociaux quantifiables. Par ailleurs, les investisseurs distinguent davantage les interactions entre capital naturel et capital financier, mais le lien avec le capital humain est encore difficilement identifiable.