Les critères objectifs
Il existe différentes catégories de critères qui définissent la valeur d’une œuvre. Parmi les critères objectifs, l’authenticité, la provenance, la condition et la législation sont les plus importants.
- Il s’agit de vérifier si l’œuvre est bien celle que le vendeur prétend posséder. Cette vérification peut se faire avec l’aide d’un expert, accompagné d’un certificat d’authenticité et d’une preuve de propriété. La provenance cherche à prouver la chronologie des différents propriétaires de l’œuvre depuis sa sortie du studio de l’artiste. En effet, des périodes d’absence d’information peuvent soulever des questions quant au risque de vol ou de pillage, d’où l’importance de la connaissance de législation applicable. Certains pays sont soumis à des restrictions commerciales qui interdisent la circulation de certains objets culturels. En Italie par exemple, les œuvres d’art réalisées il y a plus de 70 ans ou dont l’auteur est décédé nécessitent une autorisation d’exportation spéciale délivrée par les autorités.
- L’art contemporain bénéficie grandement des avancées technologiques liées à la transparence et la traçabilité des œuvres en facilitant l’authentification et la provenance grâce à la blockchain, ce registre public et dématérialisé. De plus, la qualité de cette provenance impactera positivement sa valeur si l’œuvre a fait partie de collections importantes au cours de son existence.
- La condition de l’œuvre aura aussi un impact sur son prix. Une œuvre en mauvais état, dû à un manque de qualité de conservation ou à un accident perdra une grande partie de sa valeur. Cependant, une restauration de qualité médiocre ou trop abondante aura un impact négatif, puisque l’œuvre perd de ses qualités originales du travail de l’artiste.
- Enfin, il est important de mentionner la fraîcheur de l’œuvre sur le marché, qui se traduit par le nombre de transactions qui lui sont liées. Si une œuvre est récemment arrivée sur le marché, ou n’a pas été remise en vente depuis une longue période, cela appréciera son estimation. A l’inverse, une œuvre ayant trop circulé jouera en défaveur de son prix.
Les critères comparables
Les critères comparables, quant à eux, visent à estimer une œuvre en la comparant avec son marché. Cette comparaison se fait à différents niveaux, allant du marché global de l’art au courant artistique dont elle fait partie, jusqu’au moment de sa création dans la carrière de l’artiste.
- Un de ces critères est celui d’une estimation raisonnable, qui peut être apparenté au concept de « fair value », bien connu des marchés traditionnels. Il s’agit de comparer le prix marteau contre l’estimation. Lorsque le taux de lots invendus est trop élevé, ou que le prix de vente est inférieur à son estimation, cela envoie un signal négatif quant à la cote de l’œuvre ou de l’artiste. A l’inverse, des prix marteaux excédant l’estimation témoignent d’un signal positif. Malgré tout, il faut rester prudent face à la spéculation, qui se traduit par un nombre réduit d’enchérisseurs gonflant les prix de manière artificielle. Christopher Wool, un artiste qui a longtemps séduit et dont les valorisations ne cessaient d’augmenter a vu son chiffre d’affaires annuel baisser de 46,2 millions de dollars en 2019 à 14 millions de dollars en 2020 suite à un changement de mode.
- D’un point de vue plus tangible, la rareté, le format, la période et le sujet sont tout autant de critères de qualité comparables qui permettent de juger une œuvre par rapport à d’autres artistes dont la cote équivaut, ou même au courant artistique visé. Les portraits ou les nus sont souvent plus recherchés, et donc plus chers, que les natures mortes. De la même manière, les valorisations des œuvres de certaines périodes d’un même artiste varient de façon surprenante. Un « baptême de masques » de James Ensor réalisé fin du 19e siècle coûtera beaucoup plus cher – parfois en centaines de milliers de dollars – qu’une autre toile du même acabit exécutée 30 ans plus tard, bien qu’extrêmement ressemblante en termes de sujet, de technique et de format.
Le critère subjectif
Le critère de qualité le plus divergent des marchés traditionnels est sans aucun doute celui, très subjectif, de la mode, qui influe grandement sur la valeur des œuvres. Bien que comportemental et parfois exacerbé par la spéculation, il reste malgré tout un critère de haute importance, puisqu’il va centraliser l’intérêt d’un grand nombre de collectionneurs autour d’un même courant ou groupe d’artistes. Ce phénomène est défini de façon plus ou moins subjective et personnelle par les faiseurs de tendance. Ces influenceurs sont à la fois représentés par des personnalités du monde institutionnel et des critiques, mais aussi par certaines galeries internationales et grands collectionneurs. Pour cette dernière catégorie, il faut malgré tout faire la distinction entre les collectionneurs de renom et les spéculateurs fortunés, dont les intérêts se basent majoritairement sur des gains personnels potentiels. L’effet de mode peut propulser la carrière d’un artiste, tout comme il peut détruire son marché. Au lendemain de la chute de Lehman Brothers, Damien Hirst a mis en vente la totalité de ses œuvres chez Sotheby’s. Malgré le moment choisi, il s’agit du plus gros chiffre d’affaires annuel de toute sa carrière. La crise de 2008 qui venait de débuter n’a eu donc aucun impact sur cette vente historique, puisque la demande était forte. Depuis lors, le changement de mode ainsi que l’abondance de l’offre ont fait chuter la cote de l’artiste. Une de ses œuvres emblématiques, « The incredible journey » (2008), qui avait dépassé le million de dollars le 16 septembre 2008, vient d’être revendue pour la moitié du prix.