Suite à une récente condamnation de l’État belge par la Cour de justice de l’Union européenne, le Gouvernement a souhaité modifier le traitement fiscal des revenus immobiliers de source étrangère afin de se conformer à la législation européenne (concernant la libre circulation des capitaux). Ces modifications devraient en principe entrer en vigueur pour la déclaration fiscale de 2022 (revenus de 2021).
La belgique condamnée pour une différence de traitement
Jusqu’à récemment, l’administration fiscale appliquait un traitement fiscal différent aux revenus immobiliers situés à l’étranger de ceux de source belge.
- En effet, les biens immobiliers (bâtis) situés en Belgique font en principe l’objet d’une imposition selon un revenu cadastral indexé majoré de 40 %, qu’ils fassent l’objet de locations ou non. A contrario, les revenus des biens immobiliers loués dans le cadre d’une activité professionnelle sont taxables sur les revenus réels, le premier régime étant nettement plus favorable.
- À l’inverse, les biens immobiliers situés à l’étranger étaient bien imposés selon un revenu cadastral local en l’absence de location, mais faisaient l’objet d’une imposition selon le montant des loyers réellement perçus en cas de location. Dans ces deux cas de figure, le revenu était diminué des impôts prélevés à l’étranger et d’un forfait censé représenter les coûts.
À ce titre, la Belgique a déjà été condamnée par la Cour de justice de l’Union européenne1 pour manquement au principe de libre circulation des capitaux2 , puis a été mise en demeure par la Commission fin 2018. À défaut de mise en conformité par l’État belge, la Commission a rendu un arrêt pour manquement d’Etat le 12 novembre 2020 condamnant ainsi le Royaume au paiement d’une somme forfaitaire de 2.000.000 euros et d’une astreinte de 7.500 euros par jour de retard dans l’exécution de l’arrêt susmentionné.
Suite à cette condamnation, le gouvernement n’a pas tardé à prendre des mesures afin de se conformer à cette jurisprudence européenne. Ainsi la loi du 17 février 2021 a été publiée le 25 février 2021 dans le Moniteur Belge.
L’administration fiscale a en outre publié une circulaire en la matière le 1er mars dernier, qui a apporté des précisions sur certaines incertitudes résultant de la nouvelle loi (2021/C/21).
Quelles sont les nouvelles règles d’imposition des revenus immobiliers de source étrangère ?
La solution retenue3 consiste à attribuer un revenu cadastral selon les règles belges aux biens immobiliers situés à l’étranger – comme c’est le cas pour les biens immobiliers situés en Belgique - qu’ils fassent l’objet de locations ou non. Pour rappel, en Belgique, le revenu cadastral est le revenu annuel net moyen qu’un immeuble est supposé générer à la date du 1er janvier 1975 (c'est-à-dire la date de référence).
Le législateur a donc eu pour objectif d’appliquer ce principe aux revenus immobiliers de source étrangère. Il convient cependant de distinguer deux situations :
- Connaissance de la valeur vénale du bien au 1er janvier 1975 mais absence de connaissance de sa valeur cadastrale :
L’administration appliquera un taux de 5,3 % sur la valeur vénale du bien à la date du 1er janvier 1975.
Exemple : un contribuable ayant acquis un bien immobilier le 1er janvier 1975 pour l’équivalent de 300.000 € (valorisé désormais 2.000.000 €) aurait un revenu cadastral de 15.900 € (= 300.000 € x 5,3 %). En pratique, cette valeur vénale au 1er janvier 1975 ne sera généralement pas disponible, de sorte que cette méthode ne sera pas souvent applicable.
- Méconnaissance de la valeur vénale du bien au 1er janvier 1975 :
Il s’agit de la nouvelle méthode instaurée par le Gouvernement et qui sera appliquée le plus souvent. Il convient désormais de se baser sur la valeur vénale normale actuelle sur laquelle un facteur de correction (calculé sur la base du taux applicable pour les obligations linéaires à 10 ans tel que publié par la Banque nationale de Belgique) devra être appliqué par année. Cela permet de déterminer une valeur vénale à la date du 1er janvier 1975.
À titre d’exemple, il sera de 15,036 pour l’année 2020 (exercice d’imposition 2021). Ce facteur de correction sera publié annuellement par le Service public fédéral Finances.
A noter que le texte légal parle de l’application d’un facteur de correction sans préciser comment ce facteur doit être appliqué : division ? pourcentage ?
Ceci a pu donner lieu à des divergences d’interprétations, entre-temps résolues par la circulaire du 1er mars 2021 dont il résulte clairement que la formule est la suivante :
(Valeur vénale normale actuelle / facteur de correction) x 5,3 %
Exemple : Un bien immobilier acquis au 1er janvier 2020 pour un coût total de 1.000.000 € devrait donc avoir un revenu cadastral calculé de la manière suivante : (1.000.000 € / 15,036 ) X 5,3 % = 3.524,87 €.
La nouvelle méthode en schéma :